Ouvrir une épicerie : la réglementation et les démarches

Ouvrir une épicerie est un projet d’entreprise et un projet de vie ! Tenir la boutique, choisir ses produits et négocier, assurer les réassorts et fidéliser une clientèle constituent les missions les plus récurrentes d’un épicier. Pour arriver à ce rythme, voici la réglementation et les différentes étapes de création d’entreprise.  

Ouvrir une épicerie : définition et différence avec une épicerie fine

Définition d’une épicerie

L’épicerie est un commerce de détail et de proximité dans lequel le client a accès aux produits du quotidien /produits de consommation courante. On parle aussi de supérette.

Epicerie et épicerie fine

Une épicerie fine se distingue de l’épicerie par la nature des produits qu’elle vend. Une épicerie fine vend également des produits du quotidien, mais de qualité supérieure, artisanaux ou luxueux. Il peut aussi s’agit de produits régionaux (épicerie fine du sud-ouest, par exemple).

La réglementation liée à l’ouverture d’une épicerie

Les normes d’hygiène alimentaire

Pour tenir une épicerie, vous devez respecter les normes françaises d’hygiène alimentaire, notamment dans le cadre de la manipulation et du stockage des denrées et produits frais. Vous devez vous tourner vers la Direction Départementale de la Protection des Personnes (DDPP) pour suivre une formation sanitaire. Ensuite, 15 jours au moins avant l’ouverture de l’épicerie, vous devrez vous déclarer à la DDPP en leur envoyant le Cerfa 13 984*05 dûment complété.

Les normes de pesage des aliments

Les instruments servant à peser les aliments doivent faire l’objet d’un contrôle par un organisme agréé, et ce tous les 2 ans. Vous devez vous tourner vers le service de métrologie de la Direccte (Directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi).

Les règles de sécurité et d’accessibilité dans l’épicerie

Votre épicerie doit être aux normes imposées aux ERP (Etablissement Recevant du Public). Il existe plusieurs catégories d’ERP avec plusieurs échelons de réglementations, selon le secteur d’activité et la capacité maximum du lieu. Vous pouvez vous tourner vers votre mairie d’implantation pour obtenir toute la réglementation (à valider une fois que vous aurez identifié le local). 

Les règles du commerce

En tant que commerçant, vous devez suivre les règles relatives aux bonnes pratiques commerciales : affichage des prix avec montant de la TVA et montant Toutes Taxes Comprises (TTC), interdiction de vendre à perte, obligation de fournir une note ou une facture au client.

La déclaration à la SACEM pour diffuser de la musique

Vous devez vous déclarer à la SACEM pour pouvoir diffuser de la musique dans votre épicerie. Vous devrez verser une redevance pour paiement des droits d’auteur, dont le montant est fixé de manière forfaitaire et variable selon la taille de votre établissement.

Démarches entrepreneuriales

Valider l’intérêt du projet dans la zone souhaitée (étude de marché)

L’épicerie est le commerce de proximité par excellence et le projet n’aura de sens que si vous rencontrez une clientèle suffisante et motivée, notamment au vu de l’offre existante. Vous devez donc trouver un emplacement stratégique qui ne rencontre pas de concurrence, tout en étant proche d’autres commerces pour être dans un lieu de passage et attirer les foules. Vous devez prendre en compte toute forme de concurrence, y compris les supermarchés et hypermarchés.

Pour votre comptabilité, mieux vaut faire appel à un expert !


Monter une stratégie de pénétration du marché cohérente avec la clientèle de quartier

Une fois le quartier idéal identifié, vous montez une stratégie commerciale qui soit adaptée aux mœurs du quartier :

  • un concept (épicerie, épicerie fine, décoration simple ou plus conceptuelle)
  • un catalogue produit en cohérence avec les personnes qui habitent dans le quartier (des familles et des gens qui travaillent, plutôt des seniors, un quartier étudiant …)
  • des prix en adéquation avec le budget des habitants (catégorie socioprofessionnelle)
  • une stratégie de communication : site Internet, flyers à distribuer dans les boîtes aux lettres, liste des prescripteurs qui pourront vous apporter une clientèle
  • la description du local idéal, notamment en termes de taille et d’aménagement

Choisir le fonds de commerce

A vos recherches !

La recherche du local

Vous accédez à la liste des locaux disponibles et des fonds de commerce en vente en vous rendant à la chambre de commerce et d’industrie ou à la mairie de votre zone d’implantation. Vous choisirez un emplacement en accord avec votre stratégie, qui soit visible et accessible pour attirer une clientèle spontanée. Vos vérifierez les projets de la ville, dans un futur proche ou plus lointain, pour être sûr que votre emplacement restera accessible à long terme.

L’analyse du fonds de commerce

Dans tous les cas, mais particulièrement si vous souhaitez acheter un fonds de commerce, nous vous conseillons de vous faire accompagner par un expert-comptable pour :

  • valider le prix
  • négocier
  • vérifier la légalité du contrat de vente et les clauses qui y sont insérées

La signature du bail

En tant que commerçant, vous signez toujours un bail commercial, soit un bail de 9 ans avec possibilité de résiliation triennale pour le locataire.

Ce type de bail vous avantage, car vous ne pouvez pas être évincé sans juste motif durant la période du bail (sauf certains cas expressément listés par la loi). C’est important pour avoir le temps de construire une clientèle fidèle.

Calculer le coût du projet (plan de financement)

Vous calculez le coût du projet de création d’entreprise en construisant un plan de financement.

Par exemple :

Budget nécessaire pour créer (Besoins) Financeurs mobilisés (Ressources)
Achat du fonds de commerce 30 000 € Apport personnel 20 000 €
Petit matériel 3 000 € Prêt d’honneur  10 000 €
Stock de démarrage 10 000 €    
Frais d’immatriculation 1 500 € Banque 28 400 €
TVA  8 900 €    
Trésorerie au démarrage  5 000 €    
TOTAL des besoins 58 400 € TOTAL des ressources 58 400 €
A noter
Veillez à minimiser le stock de départ le temps de savoir quels sont les produits qui se vendent le mieux. Vous pourrez toujours affiner votre connaissance client et ajuster vos commandes au fur et à mesure.

Veillez à inscrire les montants investis hors taxes et à prévoir une ligne à part pour la TVA. Cette somme sera effectivement déductible (et récupérable) lorsque l’épicerie sera immatriculée.

Les banques exigent un apport personnel au projet allant jusqu’à la moitié du total des besoins. Vous pouvez donc demander un prêt d’honneur si votre apport est insuffisant (ou simplement pour conserver une partie de vos deniers) auprès de l’organisme institutionnel France Initiative. Le prêt d’honneur provient des collectivités locales et il consiste en un prêt personnel sans taux d’intérêt. Les montants et les conditions du prêt d’honneur diffèrent selon la collectivité.

Modéliser le cycle d’exploitation (compte de résultat prévisionnel)

COMPTE DE RESULTAT PREVISIONNEL EPICERIE ANNEE 1
Chiffre d’affaires 180 000 €
Achat des produits 80 000 €
Loyer 8 000 €
Ménage 2 400 €
Electricité 2 000 €
Frais de comptabilité 4 500 €
Rémunération du gérant 24 000 €
Cotisations sociales du gérant 10 800 €
Intérêts d’emprunt 3 00 €
RESULTAT 48 000 €
Impôt sur les sociétés 8 490 €
Résultat net 39 510 €
Remboursement capital de l’emprunt 5 680 €
Capacité d’autofinancement 33 830 €

Le compte de résultat prévisionnel est réalisé avec les montants hors taxes. Il montre les flux financiers entrants et sortants prévus pour l’année à venir, ce qui vous permet de prendre conscience de votre cycle d’exploitation, des charges à venir, de la marge à prévoir sur la vente de produits et du chiffre d’affaires à encaisser pour couvrir vos frais, rembourser votre emprunt, vous rémunérer, etc. Ce tableau formalise le modèle économique de vote entreprise. Si l’objectif de chiffre d’affaires est réaliste, la rentabilité du projet est validée.

En phase de création d’entreprise, on réalise normalement un compte de résultat prévisionnel pour les exercices 1, 2 et 3.

Anticiper ses flux financiers (compte de suivi de trésorerie)

  janvier février mars avril mai
Chiffre d’affaires  3 000 € 5 000 € 8 000 € 10 000 € 12 000 €
Matières premières (1er stock déjà acheté et budgété dans le plan de financement à 10000 €) 0 € 0€ 4 000 € 4 000 € 0
Loyer 800 € 800 € 800 € 800 € 800 €
Electricité 250 € 300 € 200 € 200 € 150 €
Ménage 240 € 240 € 240 € 240 € 240 €
Honoraires expert 450 € 450 € 450 € 450 € 450 €
Remboursement intérêts 0 0 0 100 € 0 €
Remboursement capital 475 € 475 € 475 € 475 € 475 €
Rémunération gérant         2 000 €
Cotisations sociales forfait         5 400 €
Résultat 785 € 2 735 € 1 835 € 3 735 € 2 485 €
Trésorerie (démarrage 5 000 €) 5 785 € 8 520 € 10 355 € 14 090 € 16 575 €

Le compte de suivi de trésorerie permet d’anticiper les entrées et les sorties d’argent mensuelles, à leur date réelle d’encaissement et de décaissement. Ce tableau permet de visualiser le besoin en fonds de roulement et la saisonnalité de l’activité (certains mois seront en baisse selon le niveau d’affluence). Un compte de suivi de trésorerie est réalisé avec les montants Toutes Taxes Comprises.

Choisir le statut juridique optimal

L’auto-entreprise est prisée pour sa facilité administrative, mais elle est fortement déconseillée pour un projet tel que le lancement d’une épicerie. En effet, le risque financier et les flux financiers sont élevés. Or en auto-entreprise, vous ne pouvez pas déduire vos frais. Votre fiscalité est calculée sur le chiffre d’affaires de l’activité, qu’importe le bénéfice réellement encaissé. De plus, l’auto-entreprise est une entreprise individuelle qui ne permet pas de sortir votre patrimoine personnel des risques liés à l’activité. A éviter à tout prix !

Privilégiez :

  • l’entreprise individuelle au frais réels (attention, là encore pas de séparation de patrimoine et la fiscalité est peut-être plus difficile à optimiser)
  • la société à responsabilité limitée ou la société par actions simplifiée (SARL ou SAS)
Zoom
Dans tous les cas, une prestation de conseil auprès d’un expert-comptable vous permettra de valider le bon statut juridique et de connaître les incidences fiscales, patrimoniales et sociales.

Les formalités pour créer légalement l’épicerie

Immatriculation de l’entreprise

Pour pouvoir exercer votre activité légalement, vous immatriculez l’entreprise au Registre du Commerce et des Sociétés (RCS)en déposant un dossier au centre de formalités des entreprises de la Chambre de Commerce et d’Industrie.

Si vous créez une société, vous devez joindre au dossier d’immatriculation :

  • vos statuts constitutifs paraphés et signés
  • une attestation de dépôt du capital social sur un compte bloqué
  • une attestation de publication dans un journal d’annonces légales

Déclaration d’existence à la DDPP (15 jours avant ouverture)

N’oubliez pas de faire la déclaration préalable d’activité à la DDPP, au moins 15 jours avant l’ouverture de l’épicerie (en leur faisant parvenir le formulaire officiel Cerfa 13 984*05).

Souscription d’une assurance RC Pro (indispensable !)

N’oubliez pas de souscrire une assurance RC Pro (assurance civile professionnelle) pour vous protéger de tout vol, dommage ou accident causé dans l’épicerie et/ou dans le cadre de l’exercice de votre activité. Cette démarche n’est pas obligatoire, mais elle est indispensable pour vivre sereinement votre quotidien d’épicier !

La franchise en épicerie fine est-elle rentable ?

L’épicerie fine, ce havre de délicatesse et de saveurs, a su au fil des années se tailler une place de choix dans le cœur des gourmets. Mais au-delà de l’expérience gustative qu’elle offre, se pose la question de sa viabilité économique lorsqu’elle est exploitée sous forme de franchise.

Intégrer un réseau de franchise offre un panel d’avantages indéniables. Parmi ceux-ci, la notoriété de la marque permet d’attirer une clientèle déjà conquise par la qualité des produits. Les franchisés bénéficient également d’un accompagnement stratégique solide : formation initiale, conseils en marketing, aide à la gestion, pour ne citer que cela. Ces éléments, judicieusement exploités, peuvent substantiellement accroître la rentabilité de l’entreprise.

  • Face à ces atouts, certains écueils se dessinent toutefois.
  • Le secteur de l’épicerie fine est un univers hautement compétitif, où les marges sont parfois réduites.
  • Les franchisés sont également soumis à des redevances et des frais d’entrée qui peuvent peser sur la rentabilité initiale.
  • De surcroît, une immersion dans cet univers requiert une passion et une connaissance profonde des produits pour se démarquer et fidéliser une clientèle exigeante.

Néanmoins, une analyse minutieuse du marché local, jumelée à une stratégie d’achat efficace, peut conduire à une rentabilité attrayante. La clé réside dans la capacité à offrir une expérience unique : dégustations, conseils personnalisés, ateliers culinaires. En misant sur une interaction privilégiée avec la clientèle, l’épicerie fine franchisée peut rapidement devenir un lieu de prédilection pour les amateurs de produits d’exception. Vous pouvez donc ouvrir une épicerie fine en franchise en toute sérénité ! 

L’équilibre est donc délicat à trouver. Si la rentabilité n’est pas immédiate, elle demeure envisageable avec une gestion rigoureuse, une offre adaptée et une relation client soignée. Le secteur de l’épicerie fine, avec sa promesse de découvertes gustatives incessantes, offre un terrain fertile pour les entrepreneurs passionnés désireux de s’investir dans une aventure aussi savoureuse qu’enrichissante.